L’UNEDIC AU REGIME SEC

La mise au pas des quémandeurs d’emploi
mercredi 2 octobre 2019
par  secretariat AC !

. « Les prestations seront strictement
conditionnées aux efforts de recherche,
avec un contrôle drastique. »
Emmanuel Macron.

. « Il est devenu de plus en plus difficile
de faire abstraction de l’immense capacité
de production de la société et de la réalité
du chômage de masse, du sous-emploi,
de la pauvreté et des réductions
incessantes
dans les arts, l’éducation et les services
sociaux. »
Alastair Hemmes.

La réforme de l’Unédic, le durcissement des conditions d’accès à l’assurance chômage, va priver d’allocation plus de 40 % des demandeurs d’emploi (les entrants). De plus, l’Unédic fait valoir que les nouvelles modalités de calcul provoqueront un recul de 19 % en moyenne pour l’allocation journalière et jusqu’à 50 % pour le montant mensuel. Les conditions d’entrée permettant l’accès aux faméliques pactoles sont vicieusement sélectives : il faudra avoir travaillé six mois sur vingt quatre (au lieu de quatre sur vingt huit), pour être éligible aux allocations qui, présentement, tournent autour de mille euros mensuels. Les « assistés » de l’Unédic représentent moins de 50 % des demandeurs d’emploi, rappelons-le. Pour les traînards reste l’ASS, pour les plus méritants, le Rsa pour les empotés irréductibles. Minima sociaux, qui plafonnent aux alentours de 500 euros mensuels. Dans quelle case économique va-t-il falloir mettre les 200 000 demandeurs d’emplois qui n’auront accès à aucune allocation ? (Prévisions). Basculement vers le Rua ?
Nous avons quelques raisons de craindre l’instauration disciplinaire du Rua (Revenu Universel d’Activité), dont nous attendons de connaître contours et modalités d’application.

Un « populicide » programmé

Pour certains , nombreux, c’était déjà difficile, c’est maintenant la survie même qui va devenir problématique.
Les plus fragiles, sont souvent jeunes, précaires, peu qualifiés, les femmes sont fort présentes dans cette population paupérisée. Ce sont les couches populaires qui vont être en premier lieu durement frappées. La réforme, féroce, vise à éliminer, à discipliner, à mettre au pas, les peu vendables, les « inutiles au monde », « ubérisés » s’ils savent se montrer entreprenant.
Par nécessité – programmée – les demandeurs d’emploi vont se résigner à devenir des quémandeurs d’emploi. Nous assistons à une nouvelle émergence d’une abondante domesticité salariale, un nouveau prolétariat. Au service, pour la plus grande jouissance, de la ploutocratie apatride.
L’ouverture des frontières, l’immigration appelée par le Médef, la concurrence mondialisée, globalisation stratégique qui ainsi, sans cesse, augmente la masse de « l’armée industrielle de réserve », dont depuis toujours, le Capitalisme tend à augmenter les effectifs.
C’est le « populo » qu’on écrase, « ceux qui ne sont rien » suivant l’expression du fondé de pouvoir des milliardaires. Assumons le néologisme : « populicide », … dont la justesse semble confirmé par quelques déclarations syndicales qui font émerger la tentation d’éliminer « les inutiles au monde » : « Ça va être une tuerie, tout simplement, parce que la seule logique, c’est la logique budgétaire sur le dos de chômeurs ». Laurent Berger, Cfdt. « Ça va créer une trappe à pauvreté. C’est encore pire que prévu », commente, dramatise Fo.

Madame Pénicaud veille au grain pour accumuler gros

La fluidité du « marché libre » exige l’assouplissement des salariés, et la flexibilité compréhensive du chômeur qui ne doit pas craindre de traverser la rue pour trouver de l’embauche.
Pourtant, les compétences de Madame se sont d’abord affirmées dans la conduite des licenciements.
DRH, chez Danone avec élégance, elle conduit un plan de licenciements qui toucha 900 salariés . Pour récompense (?!) elle empocha, la dame sévère avec les chômeurs, 4,7 millions entre 2012 et 2014. Les licenciements ça rapporte gros : la réforme de l’Impôt sur la fortune (ISF), conduite par Monsieur Macron, complice dans ses œuvres mauvaises, lui fit économiser 62 000 euros, soit 5 années de Smic.

En conséquence, intransigeante, c’est au sabre d’abordage que Pénicaud tranche et ampute sans état d’âme les maigres allocs des chômeurs. Ainsi allégés les « quémandeurs d’emploi », avec vélocité traverserons la rue pour faire le trottoir. Champagne au Médef : « la force de travail » atteint un alléchant « low cost » !

« Dans l’entourage de Muriel Pénicaud, la ministre du travail, on regrette que l’étude de l’Unédic ne semble pas prendre en compte les changements de comportements que les mesures provoqueront, sur les entreprises, comme sur les salariés. » (Bertand Bissue, Le Monde, sa. 21 nov. 2019)
Donc, c’est étudié pour. Madame Pénicaud veille au grain pour accumuler gros. Vu ses antécédents, on n’en attendait pas moins.

Insuffisance de l’indemnisation … et ça va s’aggraver !

Pour nous en tenir aux chiffres donnés par une publication documentée et sérieuse : Pour une sécurité sociale du chômage. Par AC !, éditions Syllepse, 2018.
Toutes catégories confondues,( et il y en 5), au deuxième trimestre 2018, 6,58 millions d’inscrits à Pôle Emploi (6,24 millions en France Métropolitaine). Les chiffres médiatisés sont ceux de la catégorie A seulement. Quant aux indemnisés ( touchant l’ ARE, Aide au Retour à l’Emploi), il étaient de 2,63 millions soit 42 % des chômeurs. Selon Pôle emploi, le montant mensuel brut moyen serait de 1 180 euros pour – rappelons-le – les bénéficiaires minoritaires de l’ARE.

Au fil de quelques décennies on observe une diminution globales des droits, avec un abaissement du montant des allocations et un écourtement des durées maximales. (Pour une sécurité…, op. cité, p.18).
C’est aux alentours de années 2000 (?) que l’indemnité pour perte d’emploi, fut requalifiée en allocation pour recherche d’emploi, et aujourd’hui aide au retour à l’emploi, la perdurant ARE. Les variations sémantiques sont signes de changements politiques.

Trop généreuse encore l’ARE doit être réduite pour accélérer la soumission dans les emplois dégradés. Logique. C’était insuffisant pour « motiver »,... il faut donc réduire (affamer sérieusement) encore pour renforcer les motivations…
La pure logique du capitalisme voudrait que les non rentables, in-exploitables dont le nombre est chaque jour accru par l’automatisation de la production cybernétique soit laissés à leur déchéances économiques et sociales. Les classes sociales supérieures dans leurs enclaves sécurisées observant en surplomb la lutte féroce des inemployables pour de rares emplois serviles et logements sociaux dégradés. L’argent n’a pas d’odeur, le sentimentalisme ne paie pas.

La valeur travail en constante dévaluation

Selon les propos de Madame la Ministre du travail : « Il est possible de rester indéfiniment au chômage indemnisé en travaillant un jour sur deux », déclaration en juin 2019.

Fichtre ! Une réduction du temps de travail financée par l’Unédic ! Après réforme ce serait les caisses du patronat ( et les contribuables par la Csg) qui sustenterait les paresseux qui triment à 50 % à peine ! Inadmissible.
Il fallait sévir. C’est fait et fortement fait.
Il faut bien le dire, quitte à n’être pas conforme au discours travailliste syndical, aux incantations productivistes d’une bonne partie de la gauche. Nombre de boulots sont perçus comme de simples, parfois pénibles gagne-pain. Ce n’est pas le cœur en joie que l’on va au turbin (d’aucuns peu respectueux, ayant peu de respect pour valeur/vertu du travail, se rendent fort contraint au tapin...)

C’est plutôt chagrin. La multiplication des « boulots à la con » (les bullshit jobs en franglais), font que nombre de petits matins sont de véritables calvaires pour un grand nombre de salariés qui ne vont au turbin que pour assumer les frais de la vie quotidienne.

Certains de ces emplois donnent accès à des salaires qui ne sont pas misérables, pourtant, le pognon ne comble que partiellement le vide existentiel creusé par une activité dont le sens, l’utilité sociale ne sont guère évidents. Et, oui, une certaine alternance travail/chômage est (était ?) planifiée par certains salariés. Juste et saine récupération.
Les allocations diverses, les « générosités » de l’État Providence (en cours de démolition), sont perçues et encaissées comme moyen d’échapper aux servitudes de la condition salariale.
La valeur travail (au sens moral) est en voie de disparition, le discrédit est déjà grand : la bonne attitude morale, le respect de soi même pas plutôt pat une valorisation du temps libre, c’est à dire libéré des contraintes qui font les grands profits du capitalisme..
C’est d’autant plus nécessaire et urgent que la valeur travail – au sens économique – dont le détournement par les actionnaires forme la substance des profits, est de plus en plus difficile à extraire dans l’économie réelle. Les dérivations vers l’économie monétaire sont le signe de cette crise dans les modalités historiques de production et consolidation de la plus-value (sur valeur).
Pour continuer à mettre en scène la comédie du travail tous les artifices sont réquisitionnés. Les faux emplois se multiplient pour consolider une idéologie défaillante.
Il reste à mettre en musique ces Adieux au prolétariat. Veillons à ne pas laisser l’écriture de la partition aux compositeurs libéraux.
Depuis de nombreuses années AC ! (avec d’autres associations, et des minorités syndicales et politiques), met en avant quelques propositions de réformes radicales que nous soumettons à la critique et au débat.

Réduction – féroce – du temps de travail et revenu garanti

Absurdité et paradoxe : les libéraux, fidèles exécutants des exigences du patronat sanctionnent les demandeurs d’emploi, précédemment licenciés. L’obligation impérative est énoncée : il faut travailler, alors que dans le même temps le grand patronat n’a de cesse de supprimer des emplois pour augmenter le volume des profits !
Le chômage est une forme – nocive – de réduction du temps de travail. Profitable au capital…
Nous en préconisons une bien meilleure : la réduction généralisée du temps de travail. Il y a plus de 20 ans, les 32 h hebdomadaires nous semblaient raisonnable. Cette rtt, d’une férocité contenue, permettrait de créer environ 2 millions et demi d’emploi...

Aujourd’hui, compte-tenu des gains de productivité (informatique, robotique, Intelligence artificielle,…), nous pourrions faire mieux, en travaillant beaucoup moins, pour mieux travailler tous. Pour être efficace la rtt doit être féroce !

Le plein emploi, … ce n’est pas pour demain.
Il faut bien vivre, le Smic au minimum doit être accordé à tous celles et ceux qui sont en attente d’emploi.
Le revenu de base ou revenu universel de base, tel qu’il est préconisé par le Mouvement Français pour le Revenu de Base (MFRB) ne fait pas l’unanimité à AC !, de vives discussions ont toujours lieu.

Ces deux revendications réclament une forte mobilisation pour faire céder la ploutocratie cynique, nous en sommes conscient. Il s’agit, en premier lieu, de répondre à l’urgence : donner à toutes et chacun les moyens d’une vie décente, condition de la liberté politique réelle, de l’implication citoyenne motivée.

Au delà de cet objectif formulé en termes principalement en termes économiques, c’est un projet de société qui se dessine en opposition radicale à la barbarie libérale-capitaliste dont nous observons chaque jour l’émergence et la consolidation légalisée (destruction du code du travail, droits à la retraite remis en cause, suppression de l’ISF,…).

Nos sociétés occidentales n’ont jamais été aussi riches, pour perdurer les oligarques organisent gaspillage, surconsommations ostentatoire pour certains et privations de biens premiers pour un grand nombre. Pour des raisons d’écologie environnementale (dérèglement climatique, réchauffement lourd de danger,…), mais plus encore pour des raisons d’écologie mentale, il faut, c’est vital, imaginer, organiser un nouveau paradigme. Travailler moins, pour produire et consommer mieux, des valeurs d’usages durable. Refuser d’être quémandeur, n’est qu’un premier pas sur le chemin des inventeurs.

Gros boulot pour bâtir la société du temps libéré !

AC ! Secrétariat.

Octobre 2019.

Réforme de l’Unédic, appréciations…

. "Ça va être une tuerie, tout simplement , parce que la seule logique, c’est une logique budgétaire  " . Laurent Berger, Cfdt.

. « Assurance chômage : une réforme sanglante ». Alternatives économiques.

. « Ça va créer des trappes à pauvreté. C’est encore pire que prévu. » Force Ouvrière.

. « Une assurance chômage de misère pour museler les salariés » Cgt intérim.

. «  Il s’agit d’affamer les chômeurs pour les contraindre à traverser la rue pour faire le trottoir . » AC ! Agir Ensemble contre le chômage !

. « Champagne au Médef : le retour sur investissement est correct. Le patronat en rêvait, Macron l’a fait ! » Anonyme.

. « Madame Pénicaud aux anges : la force de travail « low cost » est enfin disponible ! Anonyme.

. «  Macron soupçonne les chômeurs de se la couler douce.  » Marianne.

."Avec l’automatisation et l’utilisation des neurosciences ils [les ploutocrates] n’ont plus besoin de ces 3500 millions d’êtres humains pour faire rebondir la système capitaliste. Ce sont de bouches qui ont faim, qui ont soif et qui sont inutiles." Monique Pinçon-Charlot. Sociologue et coauteur du livre "Le président des ultra-riches".


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