MAIS QUI A PEUR DE L’AUTONOMIE DES FEMMES ?

Femmes contre les précarités, le chômage et les discriminations
jeudi 17 février 2022

En cette période de crise sanitaire, le travail de beaucoup de femmes est invisibilisé et très mal rémunéré, alors qu’il est plus que jamais essentiel pour la société...

Des luttes intersectionnelles victorieuses

Plusieurs victoires de travailleuses en lutte ont eu lieu cette année.

- Dans la sous-traitance, celle des femmes de chambre de la société STN à l’hôtel
Ibis Batignolles, après 22 mois de grève, de juillet 2019 à mai 2021. Celle des femmes de ménage de la société Arc-en-ciel, qui ont fait grève une semaine en septembre 2021 à l’université de Jussieu. (Toutefois, le protocole de fin de grève ici n’a pas été respecté, un délégué syndical a été licencié depuis). Ces grèves récurrentes depuis plus de 20 ans posent la question de l’arrêt de la sous-traitance et de l’intégration chez le donneur d’ordre pour les femmes immigrées et racisées.

- Le collectif La force invisible des aides à domicile s’est constitué en juin 2020.
Plusieurs grèves de salariées d’organismes du secteur ont mis au premier plan de
l’actualité la nécessité d’améliorer les contrats et de revaloriser les salaires.

- Dans l’éducation, plus de 100 000 AESH revendiquent la création d’un statut de la fonction publique, une revalorisation des volumes horaires et des salaires, des
recrutements, la suppression des PIAL qui obligent à travailler dans plusieurs
établissements. Des avancées ont eu lieu mais sont loin de suffire.

Toutes ces travailleuses courageuses nous montrent le chemin que les femmes
doivent emprunter pour conquérir leur autonomie matérielle et financière.

Les femmes, cibles de la réforme de l’assurance chômage

La récente réforme de l’assurance chômage (loi Pénicaud du 05/09/2018, décrets du 26/07/2019 et du 30/03/2021), que le gouvernement a fait passer en force, à la faveur d’une prétendue « embellie » de la situation économique, va encore aggraver la dévalorisation des emplois pour de nombreuses femmes. Les personnes qui travaillent en emploi discontinu sont en effet visées par cette réforme, qui a durci les conditions d’ouverture des droits à des allocations chômage et a modifié à la baisse le mode de calcul du montant des allocations. Or, la majorité des salariés travaillant en contrats courts sont des femmes ; de plus, celles-ci cumulent souvent les désavantages de contrats précaires, d’horaires à temps partiel et de bas salaires...

Le régime d’assurance chômage n’indemnisait déjà, avant la réforme, que 42 % des demandeurs d’emploi inscrits - 50 % en tenant compte de l’ASS, allocation de 490 euros financée par l’Etat. Elle n’en indemnisera désormais que 30 %. Les indemnités de chômage étaient en 2019 d’un montant mensuel net moyen de 955 € (845 € pour les femmes et 1080 € pour les hommes – soit 22 % en moins pour les femmes). Elles sont abaissées en moyenne de 17 % pour plus d’un million de chômeurs-ses et jusqu’à 43 % pour une partie d’entre eux.

Même pour les chômeurs-ses indemnisé-e-s, l’assurance chômage n’assure pas un revenu de remplacement décent, car il n’existe pas de montant minimal de l’allocation journalière et les personnes ayant travaillé à temps partiel voient leur allocation calculée en proportion de la quotité du temps partiel. Ce qui revient à faire comme si ces personnes étaient responsables de la précarité de leurs contrats et de leurs faibles horaires...

Deux millions de personnes sont bénéficiaires du RSA, dont une majorité de femmes. Etant donné la nouvelle réforme de l’assurance chômage, des milliers de femmes supplémentaires vont se retrouver dans les minima sociaux, et certaines sans aucune allocation - si les ressources de leur foyer sont au-dessus du plafond du RSA.

Déconjugaliser les allocations de minima sociaux

Actuellement, une famille sur 4 est monoparentale, avec une femme à sa tête dans plus de 80 % des cas. Plusieurs millions de femmes et d’enfants vivent sous le seuil de pauvreté et les séparations sont très difficiles, faute d’accès à un logement et à un revenu. Les violences familiales n’ont fait que redoubler depuis quelques années. Le refus de déconjugaliser les allocations de minima sociaux (dont l’AAH) malgré les protestations de nombreuses associations, enferme des milliers de femmes dans un statut de mineures, car elles n’ont pas droit à des allocations dès lors que le conjoint gagne plus d’un certain montant (847 euros pour le RSA, 1634 euros pour l’AAH - pour un couple sans enfant).

Tout ceci traduit la crainte du patronat et des gouvernants d’une désagrégation de la famille – alors que cette dernière est au fondement de l’ordre patriarcal. Mais qui est, en réalité, responsable de la « crise de la famille », alors que la flexibilité, la précarité et la mobilité contraintes, ne permettent pas d’articuler vie familiale et vie professionnelle ? L’accès à l’autonomie des femmes fait peur, car c’est un élément favorable à l’émancipation de la classe laborieuse et à l’affirmation d’un nouveau type de familles, non fondé sur la domination des femmes par les hommes.

Face à une telle situation, nous rappelons les revendications de notre collectif :
- L’abrogation des lois de destruction du code du travail.
- Des centres d’hébergement pour les femmes en précarité.
- La transformation des emplois précaires en emplois pérennes.
- Une indemnisation de toutes les formes de chômage au moins à hauteur du Smic mensuel net.
- L’attribution des allocations de minima sociaux sur le critère des ressources personnelles.

Nous appelons à rejoindre la manifestation du 8 mars 2022
à Paris - départ à 14 H à Gare du Nord.
Femmes contre les précarités, le chômage et les discriminations

Maison des femmes de Paris, 163 rue de Charenton, Esc 13 Bât 4, 75 012 Paris.
femmescontreprecarites@outlook.fr


Documents joints

tract 8 mars 2022 Femmes contre les précarités