Chroniques catalanes...

par Alain d’AC ! Clermont ferrand
samedi 16 mars 2002
par  le réseau d’AC !

Partis dimanche 10 mars en voiture, après un campement sommaire sur la plage de Collioure, nous nous sommes présentés au poste frontalier du Perthus (par la nationale.) Immédiatement, les douaniers espagnols nous ont demandé de garer la voiture, nos papiers, ont fouillé nos vestes, vidé nos poches, nous avons dà» vider le coffre qui était archi plein (bouffe, sacs...)
Ils nous ont demandé notre destination. Bien que nous leur ayons dit que nous nous rendions àTerrassa, ils avaient compris que nous nous rendions àBarcelone. Après avoir bien épluché nos documents (tracts, journaux des Marches), ils nous ont annoncé que nous ne pouvions passer et que nous avions la possibilité de porter plainte auprès de l’ambassade. Après une bonne heure et demie d’attente, nous avons donc dà» faire demi-tour, direction le Boulou, où après avoir planqué tracts et journaux, nous avons ànouveau pris la direction du Perthus, mais cette fois par autoroute. Nous sommes passés sans problème. Après quelques autres péripéties lors du pic-nique de midi, nous avons pu arriver àTerrassa, banlieue rouge de Barcelone.

Une vingtaine de personnes, des copains de la CGT, étaient réunies (comité de soutien àdeux de leurs camarades incarcérés depuis 6 mois pour délits d’opinion, Diego et Laura Riera) Nous traduisons des textes que nous ferons suivre (pétition de soutien envisagée.) Les personnes qui étaient làen réu étaient pratiquement toutes très jeunes, issues de squats pour la plupart. Terrassa a compté jusqu’àune dizaine de squats. Actuellement, il en resterait deux, tenus essentiellement par de jeunes militants de la CGT.
Terrassa est devenue une ville dortoir, l’ensemble des usines ayant fermé dans les années 73-80 ; en fait, il ne reste que les cheminées gardées et décorées parfois, emblèmes d’une industrie autrefois florissante.

Aujourd’hui, Terrassa compte 18 000 personnes au chômage. Le taux d’indemnisation varie entre 300 et 400 € (2 000 - 2 600 F) versés àla fois par la municipalité et la région (Catalogne.) Ces allocs sont versées en moyenne pour une période de 6 mois àun an. Ensuite viennent les aides sociales versées sous condition, genre travail précaire. La population touchée par le chômage est pour la plupart jeune ou de plus de 45 ans. Quant aux salaires, une retenue de 10 ou 12 % pour la sécu est pratiquée, ainsi que de 8 % pour le chômage.

La Catalogne a une superficie de 31 980 km, environ 6 % du territoire espagnol. Taux de chômage : 5,9 % (taux global en Espagne : 9,2 %) ; Régime : gouvernement autonome depuis 1980, région autonome depuis le 18 septembre 1970. Avec 25 % de la production nationale, la Catalogne est la principale région industrielle espagnole. Barcelone et sa zone d’influence comptent un tiers de chômeurs de moins que le reste du pays.

Notre camarade José Maria nous a accueillis royalement. Syndicaliste àla CGT, il a déjàété arrêté de nombreuses fois. Pendant toute la semaine, des militaires venus de toute l’Espagne sont venus renforcer le dispositif habituel. Dès les premiers jours de cette semaine de manif ceux ci ont d’ailleurs expulsé violemment des squatteurs dans un quartier reculé de Barcelone, 18 personnes ont été arrêtées. Selon les lois, elles peuvent risquer jusqu’à6 ans de prison. Flics, militaires étaient omni présents dans toute la ville, contrôlant régulièrement, àla gueule du client, principalement sur les carrefours.

  • Mercredi 13 mars

Nous apprenons que la CGT ne manifestera pas avec la CES. C’est donc une bonne nouvelle ! D’autant plus que la CES, le lendemain, ne réunira que 100 000 personnes !
Un tour au centre de convergence, àla CGT, histoire de laisser quelques messages, et nous repartons àTerrassa.
Bien évidemment nous avons pratiqué toute la semaine les transports gratuits. D’ailleurs ce jour-lànous avons eu droit àun contrôle dans le métro. Non contents de nous demander nos papiers, ils ont bien évidemment fouillés nos sacs. C’est àpartir de ce moment-làque nous avons décidé de nous balader avec un minimum de papiers (tracts) et que nous avons décidé de nous faire passer pour des musicos (festival de jazz àTerrassa oblige).

  • Jeudi 14 mars

Balade au centre de convergence, reconnaissance du parcours de la prochaine manif.
C’était également le jour de la manif de la CES,et bien évidemment nous n’avions pas envie d’y traîner... retour àTerrassa, où nous avions mieux àfaire : discussion avec les copains du coin.

  • Vendredi 15 mars

José Maria nous a amenés àBarcelone où nous devions rester les deux jours suivants. Le matin nous sommes allés àla Sardinada organisée par la CGT àla Rambla del Raval, où nous sommes restés jusqu’à14 h, pour nous rendre ensuite au centre de convergence d’où partait une manif écolo. Quelques pas de course, la Rambla bloquée par les flics, la routine... Ce soir-lànous devions retrouver les Marches à20 h àla CGT, pour une réu. Un film sur Gênes était également projeté au CCCB. Nous y avons d’ailleurs retrouvé Michel de Bayonne avec qui nous avons passé la soirée.

  • Samedi 16 mars

Réunion des Marches européennes àla CGT.
Nous apprenons que 14 à16 bus sont bloqués àla frontière. Nous décidons d’envoyer un fax de protestation àla Préfecture de Perpignan où 14 bus français et 3 Belges viennent de retourner. Une conf de presse devait se tenir àPerpignan et une manif était envisagée dans la ville.

La préparation de Séville a été abordée àla réunion, ainsi que la préparation du Forum Social Européen, la Journée Européenne pour le Revenu garanti le 30 octobre.

En Italie, une organisation de chômeurs (Naples) existe depuis 1974. Très bien organisée, ce qui n’est pas le cas dans le reste du pays. Au bout de 8 ans de lutte, ils ont obtenu des emplois précaires dans diverses administrations (4 000 emplois.) Aujourd’hui, il existe encore un réseau de 500 chômeurs en activité sur Naples. Dans les manifs actuelles, un hommage àCarlo Giuliani est toujours fait.

Petites réflexions entendues : au centre de convergence se trouvait placardée une annonce comme quoi Bernard Cassen allait tenir une conf àl’Université de Barcelone, au nom du mouvement social ! Depuis quand une personne peut-elle se déclarer « Porte parole  » du mouvement social ?! Rien d’étonnant après cela que ce même Bernard Cassen se soit fait siffler lors de son intervention.

300 000 à400 000 personnes contre l’Europe du capital : du jamais vu lors d’un sommet Européen...

Une véritable lame de fond de manifestants a déferlé dans les rues de Barcelone pour la dernière manif. Présents dès 17 h, nous avons dà» patienter près de deux heures avant de pouvoir nous mettre en route. Derrière nous se trouvait un groupe assez important de jeunes avec banderoles et pancartes, badges, pour la légalisation de l’herbe.
Devant nous marchait un important groupe libertaire, CNT, FA, No Pasaran. Le passage d’ hélicoptères déclenchait des cris de toutes parts, contre la guerre, pour la Palestine, contre l’État policier : 300 000 personnes selon la presse espagnole, 250 000 selon les flics et environ 500 000 selon les organisateurs.
Après deux heures d’attente, les principaux groupes de tête (communistes, CGT) se sont fait dépasser par une véritable armée humaine composée principalement de jeunes : défilé carnavalesque, banderoles de tous styles, contre le capitalisme et la mondialisation et pour la construction de nouvelles solidarités. Comme àSeattle, un réseau invisible de collectifs autonomes, de petits groupes a fourni le plus gros des troupes. Au bout d’une demi-heure de marche, légers mouvements de panique : en fait nous nous sommes aperçus que les flics au lieu d’être devant les établissements publics étaient dedans, en vitrine ! Peu de temps après, nous avons pu voir les premières vitrines de banques et autres établissements (assurances) voler en éclats.

Le cortège était parti de la plazza Catalunya pour descendre sur le Port. Beaucoup de banderoles, faites avec les moyens du bord, énormément colorées. Indépendantistes catalans, Basques marchaient eux-aussi contre l’Europe du Capital ; la majorité était des 20/30 ans qui ont l’habitude de pratiquer sur le terrain et se retrouvent sur des actions plutôt spontanées, contre la démolition des quartiers, l’ouverture de squats, pour des papiers pour tous, contre la précarité. Ils organisent régulièrement des repas de quartiers (sardinada) Un très fort mouvement de squatteurs existe (qui ont d’ailleurs eu des problèmes pendant le sommet). Ils se retrouvent régulièrement pour des actions festives ou lors de différentes grandes manifestations. Devant nous s’étalait paraît-il un cortège d’un 1,5 km environ.

Arrivés au port, où l’ambiance était de plus en plus chaude, nous sommes tombés devant la commandature. Là, des personnes avaient démonté un muret qui séparait l’avenue en deux, et se servaient des pierres comme projectiles contre le bâtiment. De petits feux avaient étaient allumés, des fusées partaient de temps en temps. Les flics étaient autour de la colonne de Colomb, commencèrent àséparer la manif en deux. Beaucoup de personnes firent alors demi-tour.

Nous avons essayé de rejoindre les manifestants en tête, et finalement nous avons été coursés par les bleus qui nous tiraient dessus avec leur balles en caoutchouc.
Quelques heures après, non loin de la Ramba, nous avons pu voir des jeunes arrêtés, mains contre le mur, jambes écartées... Une centaine d’arrestations ont dà» avoir lieu et une dizaine de blessés graves ont dà» être hospitalisés.

Si la violence a été moindre semble-t-il qu’àGênes ou Göteborg, nous avons quand même franchi un nouveau pas, puisqu’àla frontière pratiquement aucun bus n’est passé. Ce qui laisse présager également que pour Séville, si nous voulons distribuer des tracts et afficher une banderole, le tout devra être fait une fois la frontière franchie (ce qui est possible grâce aux copains espagnols).

Pour ceux que ça intéresse, nous avons des coupures de presse en Catalan et Castillan.

par Alain - AC ! Clermont - Ferrand.


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