La dette de l’Unedic : un pognon dingue pour les banques !
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Les banquiers, financiers capitalistes rusés, ont trouvé un moyen supplémentaire pour se faire un pognon dingue. Ils nous vendent – très cher – le médicament qui est censé soigner la maladie dont ils sont la cause. Ainsi de la « dette » de l’Unedic (1).
Au total on estime le nombre de chômeurs à plus de 6 millions pour une population active de 29 millions. 43 % seulement sont indemnisés par l’Unédic, pour un montant moyen d’environ 900 euros/mois. La « dette » de l’Unédic, elle, est estimée entre 33 et 36 milliards d’euros, suivant les interlocuteurs qui ne sont pas à quelques milliards près… Les intérêts versés représentent sur dix ans la bagatelle de 3 Mds, peu de choses… sauf s’il s’avérait que les taux d’intérêt venaient à remonter.
C’est terriblement logique et prévisible : le quasi-doublement du nombre de chômeurs depuis la crise de 2007/2008 (voir tableau ci-dessous), alors que les taux de cotisations sont restés constants depuis 15 ans, ne pouvait mener qu’à un profond déficit. Qu’importe ! Les libéraux ont la solution, la bonne, celle qui rapporte gros, la financiarisation fructueuse ! Le médicament pour remettre les chômeurs dans le bon chemin, celui des « quémandeurs » d’emploi, c’est la réduction programmée des allocations. S’il faut les affamer un peu pour les flexibiliser, c’est la loi du marché.
On a donc aujourd’hui un endettement de 35,5 Mds de l’Unédic, argument utilisé par l’Etat pour dire qu’il faut réformer l’assurance chômage, mais cet endettement a été entièrement fabriqué.
En plus de l’insuffisance des cotisations patronales versées, depuis 2009, 10 % de ces cotisations sont affectées chaque année au fonctionnement de Pôle Emploi, alors qu’auparavant l’Etat finançait en majeure partie le fonctionnement des ANPE. Ces 10% financent de fait les missions publiques mais privatisées de Pôle Emploi. Ce ne sont pas les chômeurs qui en profitent ni les salariés de Pôle Emploi, c’est certain !
L’Etat se désengage donc, et l’Unedic a de plus en plus recours aux marchés financiers. Chaque année, le CA de l’Unédic décide d’émettre des obligations sur les marchés financiers pour payer les intérêts, les obligations qui arrivent à échéance et le déficit de l’année en cours. Des grandes banques achètent ces obligations pour le compte de leurs clients à l’anonymat garanti par la loi et dont une partie non négligeable a des comptes dans les paradis fiscaux. La perte total de recettes pour l’Etat découlant de l’évasion fiscale est estimée entre 80 et 100 Milliards d’€. Ces sommes fantastiques sont autant d’argent volé aux travailleurs et aux privés d’emplois. Une fraude d’un tout autre niveau que celle tant décriée des chômeurs.
Le gros pognon pour les agences de notation et les banques qui financent les emprunts …
Pour garantir sa fiabilité auprès des prêteurs, l’Unedic a recours aux 3 principales agences de notation. Rien que du sérieux, matheux sans états d’âme : Moody’s, Standard&Poor’s, Fitch. Les niveaux d’emprunts, d’où découlent le montant des allocations du chômeur de Rosny-sous-Bois sont, de fait déterminés par le bon vouloir de ces agences… on n’arrête pas le progrès de la férocité libérale ! L’évaluation est (discrètement) facturée 650 000 euros. Un pognon dingue ! Autant de moins pour les chômeurs ! Pour ces agences, la dette de l’Unédic, c’est du béton : 19 millions de salariés cotisants ça rassure ! Depuis octobre 2018, l’impôt a remplacé la cotisation dite salariale, c’est au moins aussi bon à prendre...
Les emprunts sont majoritairement garantis par L’État, ce qui explique la faiblesse des taux actuels ! C’est trop de garanties pour le MEDEF qui, pour faire monter les taux d’intérêt, vise l’emprunt libre sans aucune garantie étatique, la liberté du marché pur… ça va saigner dans les HLM !
La gestion paritaire du système d’Assurance chômage, déjà défavorable aux privés d’emploi, a, du coup, du plomb dans l’aile.
L’Unédic depuis 2003 refuse systématiquement toute augmentation des cotisations (appelées contributions), le déficit, c’est mieux dans le discours des gestionnaires responsables, ça permet de culpabiliser les assistés et les fraudeurs aux allocs.
Il ne reste plus qu’à faire appel aux mânes inépuisables (et pour cause) de la financiarisation. Les ruses de la raison financière sont subtiles : ce sont ceux-là mêmes qui ont creusé le trou qui jouent la frayeur au bord du gouffre qu’ils vont faire semblant de combler, mais en entassant gros !
Traverser la rue… pour faire le trottoir ?
Ce n’est pas une mince victoire de l’idéologie dominante que d’avoir fait triompher l’idée que la protection sociale représente une dette dont les assurés sociaux seraient les responsables.
Vue de l’Elysée, le chômage est toujours (un peu ?) volontaire, puisqu’il suffit de traverser la rue pour trouver un emploi… Aux conditions « offertes » par l’employeur, le demandeur sera d’autant moins exigeant, qu’il sera dans le besoin. Un quémandeur affamé est somme toute l’idéal libéral, juste après l’esclavage. Traverser la rue pour faire le trottoir... l’argent n’a pas de pudeur.
La nouvelle convention est en cours de négociations (novembre 2018) à l’heure où nous écrivons.
Les augures et considérations des rapports de forces, la collusion du MEDEF et de l’État « macronisé », ne nous portent pas vers un fort optimisme. Pour le MEDEF et ses sbires, la tentation est grande de faire d’une pierre deux coups. A savoir, arguer du montant de la dette pour réduire les droits de chômeurs, en évitant soigneusement d’augmenter les cotisations et même en les supprimant (ce qui est déjà achevé pour la partie des cotisations dite « salariale »). Pour le plus grand profit de ceux qui font du chômage et de la précarité un instrument au service de la discipline salariale, les patrons.
Il importe de sortir au plus vite de la financiarisation et du système-dette. Nous appelons les citoyens à se mobiliser contre la répression des chômeurs et la baisse des indemnités, les cadeaux faits au patronat (1001Mds d’€ de 2014 à 2017), la taxation des salariés et des retraités (la douloureuse CSG).
Il nous faut exiger un audit complet de la dette : à qui profitent les « déficits » ? Quelques indices plus haut...
Les véritables solutions socialement bénéfiques à la collectivité sont à chercher avec la réduction du temps de travail, l’abaissement de l’âge de départ à la retraite, les créations d’emplois induites soit moins de chômeurs à indemniser… et un déficit annulé !
Annuler la dette de l’Assurance chômage serait donc un acte de salubrité publique indispensable, mais encore insuffisant pour satisfaire les besoins sociaux et permettre aux chômeurs de percevoir au moins le salaire minimum. Un tel « enrichissement » des chômeurs serait bénéfique pour l’ensemble des salariés, qui pourraient refuser de traverser la rue et refuser les sous-emplois de l’ubérisation et autres variantes de la domesticité salariale.
1 – Ce texte s’inspire du rapport préliminaire produit par le GACDAC (Groupe d’Audit Citoyen de la Dette de l’Assurance Chômage). Ce document est disponible in extenso http://gacdac.canalblog.com/ ……