L’appel du Collectif Bruxelles 2001
par
... à BRUXELLES-LAEKEN : les 13,14 et 15 décembre 2001.
Les 14 et 15 décembre prochain, le sommet de l’Union Européenne se réunira à Bruxelles-Laeken pour conclure la présidence belge.
Ce sommet s’ouvrira dans une situation mondiale bouleversée et grosse de périls depuis les attentats aux Etats-unis. Nous avons condamné ces attentats comme nous condamnons les bombardements et les actes de guerre contre le peuple afghan. Ce sommet se tiendra aussi deux semaines avant le passage à l’€uro : les conditions de ce passage illustrent parfaitement les orientations néolibérales de l’Union Européenne : la priorité est donnée aux équilibres budgétaires et à l’orthodoxie financière libérale sans aucune prise en compte des besoins des populations.
Une Europe des inégalités et de la précarité.
L’Europe est un continent où les richesses continuent de progresser, mais ces richesses sont de plus en plus mal partagées. La politique de l’Union européenne, avec le soutien des gouvernements des différents pays qui la composent, s’inscrit totalement dans les politiques libérales mondiales. Elle s’attaque aux droits sociaux collectifs en précarisant l’emploi ; elle remet en cause les services publics en imposant la concurrence et en brisant les péréquations sociales et géographiques ; en matière d’emploi, ses consignes sont claires : l’emploi doit coà »ter moins cher et être plus flexible pour mieux s’adapter aux contraintes du marché... Et pour cela, les revenus de remplacement pour les chômeurs et les chômeuses doivent être assortis de contraintes et de conditions de plus en plus drastiques : les chômeurs doivent accepter n’importe quelles conditions de travail, à n’importe quel salaire : c’est un moyen efficace pour faire baisser le coà »t du travail. Pour que les populations se reconnaissent dans un projet européen, faudrait-il encore que cet espace permette d’améliorer les conditions de vie de l’ensemble des personnes vivant sur ce continent. C’est le contraire qui se produit : les acquis sociaux obtenus dans certains pays et traduits dans les législations nationales sont remis en cause et tirés vers le bas. Un projet européen démocratique ambitieux consisterait au contraire à aller bien au-delà ce qu’il y a de mieux dans chaque pays pour le proposer comme norme européenne en matière de droit social, environnemental.
« Pour une véritable charte des droits fondamentaux garantis  »
A Nice, en décembre 2000, les Chefs d’Etat européens ont proclamé une « Charte des Droits Fondamentaux  » . Le sommet de Bruxelles/Laeken doit débattre de la place de cette charte dans une future Constitution européenne : elle pourrait en devenir le préambule... En réalité, cette charte est loin d’atteindre les niveaux de garantie existant dans les textes internationaux, comme la « Déclaration universelle des droits de l’homme  » ou la « Convention européenne des droits de l’homme  » ... Face au développement des inégalités entre les pays du Nord et les pays du Sud, mais aussi au sein même des pays riches, ce n’est pas de moins de droits dont nous avons besoin mais, bien au contraire, de plus de droits. Si des droits européens doivent être élaborés et faire partie d’un texte politique de référence dans la construction européenne, ces droits doivent faire progresser les acquis sociaux, les libertés individuelles et collectives. Dans cette charte, même des droits existant dans les pays européens ne sont pas garantis : le droit à l’emploi, à la retraite, à un revenu minimum garanti, le droit au logement ne sont pas reconnus explicitement. C’est le plus petit dénominateur commun des droits qui a été retenu dans la logique libérale de l’Union européenne. C’est aussi la logique d’une Europe « forteresse  », fermée, dont les droits sont discriminants et destinés aux seuls « européens  ». Une telle charte, si elle devenait la référence politique sociale d’une Union Européenne élargie, donnerait encore plus de poids aux exigences patronales, aux multinationales et à leurs actionnaires ; elle serait un instrument de régression sociale, accélérant encore la spirale de la pauvreté et de la précarité.
« Le monde n’est pas une marchandise  »
Mais la construction européenne libérale, c’est aussi les tractations qui se poursuivent, au sein de l’OMC [1], sur la mise en place de l’AGCS [2] : l’Union Européenne aujourd’hui est à l’offensive pour promouvoir un nouveau cycle de libéralisation du commerce mondial et transformer toute activité humaine en marchandise. Déjà , des secteurs entiers sont largement soumis aux seuls critères de marché exigés par les multinationales : l’agriculture, l’alimentation... D’autres secteurs essentiels sont menacés par cette logique développée par l’OMC : la santé, la culture, l’éducation, l’eau, le vivant... Tout ce qui est directement rentable tomberait sous la coupe des sociétés privées pour le profit des actionnaires. Tout ce qui n’est pas rentable, mais pourtant utile à la collectivité, resterait à la charge de cette collectivité ou disparaîtrait purement et simplement !
Face à cette Europe néolibérale, une autre Europe se dessine : celle de la solidarité et des luttes, luttes pour les droits de celles et de ceux qui en sont privés (sans domicile, sans travail, sans revenu, sans papier...), luttes des salariés, notamment contre la précarité et les licenciements, luttes contre la spéculation financière et les paradis fiscaux, luttes des femmes contre les violences et la pauvreté, luttes citoyennes, luttes pour la régularisation des sans papiers, luttes pour l’annulation de la dette des pays pauvres, luttes pour le droit des peuples à se nourrir et à vivre dans un environnement qu’ils contrôlent... Le développement des ces mouvements, au plan européen, comme au plan mondial, les confronte de la part des gouvernements et des institutions internationales à une répression croissante. Leur Europe néolibérale, c’est aussi cela : la répression et la criminalisation des mouvements sociaux qui résistent, la mise en place de dispositifs légaux ou non (comme le système d’information Schengen) pour limiter les libertés d’expression, d’association et de manifestation. L’extension de la définition des actes de terrorisme est à cet effet porteuse de toutes les dérives. De Nice à Gênes en passant par Göteborg et Prague, les gouvernements ont cru que la répression et les tentatives de division décourageraient les mouvements sociaux : mais ils font fausse route. La légitimité du combat contre la mondialisation néolibérale continue de grandir dans l’opinion publique : les citoyens n’acceptent plus cette politique européenne qui conduit au développement d’inégalités en tout genre, facteurs de conflits et de guerres, à l’intérieur comme à l’extérieur du continent européen. Pour faire entendre une Europe de la solidarité et des droits A Bruxelles, nous serons là pour faire entendre une Europe de la solidarité, une Europe qui se bat pour imposer des droits sociaux, syndicaux, politiques, citoyens, culturels qui répondent aux besoins de toutes les populations qui y vivent. A Bruxelles, nous montrerons qu’il existe une alternative à la construction européenne néolibérale. Ces droits que nous voulons forment un tout et doivent être reconnus à toutes et tous, aux ressortissants de l’Union européenne comme aux étrangers et leurs familles qui y vivent. Ils doivent être garantis sans discrimination d’âge, de sexe et d’origine :
- Le droit à un revenu permettant de vivre pleinement.
- Le droit au travail, à un emploi stable et à une juste rémunération.
- Le droit à un logement.
- Le droit à une retraite et une pension.
- Le droit à une éducation gratuite et de qualité, à la formation, à la culture.
- Le droit aux soins de santé, le droit à la contraception et à l’avortement.
- Le droit à un environnement sain.
- Le droit à une alimentation saine en quantité suffisante.
- Le droit à une protection sociale de haut niveau.
- Le droit d’accès à des services publics assurant des prestations de qualité.
- La liberté des media et leur pluralisme.
- La liberté de circulation et d’installation.
- Le droit de se défendre par une reconnaissance explicite du droit de grève au niveau européen.
- Les droits civiques, syndicaux, politiques, d’organisation et de manifestation pour une réelle démocratie.
Ces droits constituent les fondements d’une véritable charte pour une Europe démocratique, sociale, écologique et solidaire. Il est possible de construire une autre Europe dans un autre monde, une Europe ouverte agissant pour des rapports égalitaires entre les peuples du Nord, du Sud et de l’Est, une redistribution des richesses à l’échelle de la planète, dans un monde de paix et de solidarité.
C’est pour cela que nous serons à Bruxelles face au sommet de l’Union européenne les 13,14 et 15 décembre...
Premières signatures : Confédération Paysanne, Correcteurs-CGT, Union syndicale G10-Solidaires,... AARG, AC !, ATTAC-France, CDA , Collectif national pour les droits des femmes, Marches européennes, Marche mondiale des femmes, Souriez vous êtes filmés, Ya Basta,...
Avec le soutien de : Alternative libertaire, Les Alternatifs, JCR, LCR, PCOF, PRC-France,...